Génétique, epigénetique et don d’ovocytes

Le Dr Véronique Bellec est médecin, généticienne et elle accompagne les femmes, les couples dans leur parcours de PMA à travers une consultation et grâce à une approche intégrative (médicale, biologique et émotionnelle). Elle est également auteur du livre « Donner la vie, science et magie ». Dans cet épisode, le Dr Bellec nous parle de génétique et d’épigénétique afin de mieux comprendre ce qui est transmis et ce qu’il se passe lors d’une conception grâce au don d’ovocytes. « Dès que l’embryon se trouve dans l’utérus de la mère il va déjà recevoir des empreintes épigénétique de la future mère »

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Barcelona IVF

On-Fertile Minds, The Barcelona IVF Podcast.

[00:00:15.110] - Lisa (Barcelona IVF)

Bonjour docteur Bellec. Merci d'avoir accepté notre invitation sur le podcast de Barcelona IVF aujourd'hui pour nous parler de sujets très intéressants de génétique, d'épigénétique, de don de gamètes.

[00:00:26.710] - Véronique Bellec

Merci de votre invitation à venir en parler. Bonjour à tous et toutes qui entendront ce podcast. Je vais peut-être commencer par me présenter.

[00:00:36.580] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, tout à fait. Merci beaucoup.

[00:00:38.860] - Véronique Bellec

Je suis médecin et à la base généticienne parce que j'ai travaillé pendant 27 à 30 ans en tant que généticienne en biologie en premier lieu. Il se trouve que j'ai été au contact des équipes de PMI souvent. Je me suis également intéressée à la psychologie, à la part transgénérationnelle et au cours de mes consultations, j'ai entendu les couples vivre les parcours de PMA, j'ai entendu leurs difficultés, j'ai entendu à quel point les médecins de PMA avaient beaucoup d'informations techniques à communiquer, mais finalement, n'avaient pas le temps de prendre en compte les aspects émotionnels. Ça m'a motivée pour créer une consultation d'approche globale de la procréation. Ça fait 10 ans que je soutiens cette consultation où j'accueille les femmes, les hommes, les couples en difficulté pour avoir un enfant avec une approche que j'appelle intégrative, c'est-à-dire alliant les parts médicales, biologiques, émotionnelles, mais aussi transgénérationnelles, voire énergétiques, le plus large possible.

[00:01:53.610] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est une belle activité et je pense que beaucoup de femmes, de couples apprécient cette approche aussi parce qu'effectivement, comme vous l'avez annoncé, ce n'est pas toujours facile pour les médecins en parcours de PMA de donner toutes ces informations et de pouvoir accompagner. Avec cette approche intégrative, c'est vraiment un plus pour les personnes qui sont en parcours. Aujourd'hui, on va parler de génétique, d'épigénétique. Peut-être, pour commencer, est-ce que vous pourriez nous expliquer la différence entre ces deux notions ?

[00:02:28.900] - Véronique Bellec

Oui. Effectivement, elle est très importante. La génétique est portée par la structure de notre ADN. C'est la science qui étudie le fonctionnement de l'ADN. L'ADN constitue notre génome. Il est hérité, comme on le sait tous, pour la moitié de notre père, la moitié de notre mère, via le spermatozoïde et l'ovocyte dont on est issu. Cet ADN est constitué de gènes dont une toute petite part s'exprime régulièrement, mais ces gènes sont responsables de la formation des protéines qui composent les hormones, les neurotransmetteurs, les anticorps, les enzymes et qui fabriquent toutes les molécules et qui gèrent le fonctionnement de nos cellules, de nos tissus, de nos organes, donc responsable en partie de notre santé et de l'évolution de notre corps également sur un plan physique.

[00:03:31.380] - Véronique Bellec

Tout seul, cet ADN a une structure figée. L'ADN subit très peu de mutations, alors que l'épigénétique représente l'ensemble des événements venus de l'extérieur qui va interagir avec le fonctionnement de l'ADN en réveillant certains gènes et en inactivant d'autres. On parle de gènes activés ou inactivés, exprimés ou réprimés. Aussi, c'est en fonction à la fois de notre âge, de nos cellules, de nos organes, de nos tissus.

[00:04:13.400] - Lisa (Barcelona IVF)

Quels sont les événements épigénétiques qui sont à l'origine de ces modifications ? C'est à la fois tout notre environnement, notre façon de vivre, notre façon de gérer notre vie. Ça va être aussi notre façon de nous alimenter, mais c'est aussi la prise de toxiques ou de médicaments. Tous les événements extérieurs. Ça va être nos émotions et concernant les émotions, ce qui est très important de retenir, c'est qu'à la fois, les émotions dues à ce que l'on vit soi-même ou aux événements de vie liés aux traumatismes qu'on a pu vivre dans notre enfance ou notre adolescence, mais ce sont aussi les événements qui ont impacté notre famille et dont on a pu hériter une part sur un plan émotionnel. Les croyances familiales, par exemple, mais aussi les traumatismes vécus par un arrière-grand-père, quelqu'un de notre famille et on peut malgré tout porter une sorte de bagage de ce traumatisme. Ça, c'est effectivement via des mécanismes épigénétiques. Vous m'interrompez si je vais trop vite.

[00:05:35.170] - Lisa (Barcelona IVF)

Non, c'est très clair. Je vous remercie.

[00:05:37.810] - Véronique Bellec

Ces mécanismes, on les a bien étudiés sur un plan biologique. Ce sont des phénomènes, ce qu'on appelle — je vais faire court par rapport à ça — méthylation, décompaction au niveau de l'ADN, acétylation, micro-ARN. Ça, ce sont ce qu'on appelle les marques épigénétiques que les biologistes arrivent à identifier et en fonction de la quantité de ces marques épigénétiques, par exemple, du taux de méthylation ou de déméthylation de l'ADN, on peut repérer des marques épigénétiques, par exemple, par une prise de sang, tout simplement, certaines marques épigénétiques plus fortes ou moins fortes chez une personne ou chez un animal, parce qu'on a fait énormément d'études chez l'animal également.

[00:06:24.830] - Véronique Bellec

Vu la rapidité de reproduction des souris, des rats, par exemple, on peut étudier trois, quatre générations par an. Là, on a pu mettre en évidence la transmission des marques épigénétiques par l'intermédiaire des gamètes, ovules ou spermatozoïdes, de ces petits animaux. Par exemple, j'aime bien raconter cette histoire qui est très connue des épigénéticiens qui raconte comment une peur peut être transmise au travers des générations. On a fait sentir à des rats une odeur inoffensive qui est celle de l'acétophénone, c'est un parfum issu de plusieurs fruits, mais malheureusement, pour ces petits animaux, ça les a soumis un facteur de stress qui est un choc électrique en leur faisant sentir cette odeur.

[00:07:21.000] - Véronique Bellec

Au bout d'un moment, évidemment, les rats répondent par la peur. Ensuite, ce qu'on a observé, c'est qu'on laisse se reproduire ces animaux sur plusieurs générations sans soumettre aucune des générations suivantes à des facteurs de stress et malgré tout, on va observer les ratons de la troisième jusqu'à la cinquième génération l'effet épigénétique suivant. C'est-à-dire que si on leur fait sentir l'odeur de l'acétophénone, ils vont répondre par la peur, alors qu'on les a laissés tranquilles. Après, on peut réparer, c'est-à-dire que si on leur fait sentir l'odeur en les caressant, en les nourrissant, finalement, ils vont finir par comprendre que cette odeur est vraiment inoffensive. Là, ça montre aussi qu'on peut faire lever la marque épigénétique. C'est pareil chez nous, ça permet de se rendre compte à quel point on peut porter une peur qui ne nous appartient pas, qui est issue d'un traumatisme vécu par une grand-mère, un grand-père ou même au-delà.

[00:08:36.100] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est intéressant de mieux comprendre, finalement, cette notion d'épigénétique versus génétique.

[00:08:46.530] - Véronique Bellec

Je vais juste insister sur un point, c'est que les phénomènes épigénétiques sont réversibles. Autant l'ADN est figé, autant l'épigénétique, les phénomènes sont réversibles. C'est-à-dire qu'on peut, en utilisant par exemple des outils de psychogénéalogie, de compréhension transgénérationnelle, se débarrasser d'un bagage, d'une peur qui ne nous appartient pas et reprendre sa liberté par rapport à ça. Ces phénomènes vont jouer par l'intermédiaire de l'action sur le cortisol qui est l'hormone de stress. Ça peut jouer sur notre fertilité. Je reviens à ce qui nous intéresse aujourd'hui, c'est-à-dire que si on a une croyance, par exemple, on a une grand-mère qui a perdu son premier enfant, qui est mort à la naissance, cette grand-mère peut transmettre cette peur, ce traumatisme à sa fille qui, elle-même, peut le transmettre à sa petite fille et la petite fille, de façon consciente ou inconsciente, peut se poser cette question : « Si je deviens maman, est-ce que mon enfant risque de mourir ? »

[00:10:05.260] - Véronique Bellec

La compréhension de l'événement ou la connaissance de l'événement qui a impacté sa grand-mère, son arrière-grand-mère, peut l'aider à lever cette peur. Ce stress, par l'intermédiaire du cortisol, peut impacter sa libido, peut impacter la maturation de ses ovocytes, peut impacter la fluidité, la mobilité de ses trompes, les trompes de Fallope et altérer la mobilité des spermatozoïdes dans un sens et dans l'autre sens de la trompe, l'arrivée de l'embryon fécondé qui est fécondé au tiers de la trompe et qui va au tiers externe et qui va arriver tranquillement, normalement grâce au mouvement imprimé par la trompe de Fallope, cet embryon va arriver dans l'utérus.

[00:10:59.250] - Véronique Bellec

Tout ça peut être altéré par des facteurs liés à une surproduction de l'hormone cortisol. D'autre part, ça peut aussi diminuer les flux sanguins dans l'utérus par spasme des vaisseaux capillaires et ainsi altérer la formation du futur placenta, donc l'implantation de l'embryon. Je vous fais un résumé un peu court, un peu rapide de ce phénomène.

[00:11:28.710] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, parce que c'est un sujet assez pointu et avec beaucoup de composantes aussi autour de cela et c'est vrai que ça m'intéressait beaucoup. Vous nous expliquiez la différence entre génétique et épigénétique et comme vous le savez, on reçoit beaucoup de patients dans le cadre de dons d'ovocytes et c'est vrai que finalement, la question qui revient souvent, c'est quels vont être les rôles de la génétique, de la part génétique, en tout cas, et de la part épigénétique. Si vous pouvez nous éclaircir un petit peu sur ce point parce que c'est vrai que c'est une question qui revient très régulièrement ?

[00:12:09.840] - Véronique Bellec

Effectivement, c'est une question cruciale. La génétique, ça va être l'apport de l'ADN de l'ovocyte, conjugué à l'ADN du spermatozoïde du conjoint, du futur papa. Ces deux ADN conjugués vont permettre l'arrivée de la vie des embryons et le développement de ses cellules. Sans cet ADN venant de chacune des gamètes, il n'y a pas de vie. Pas de vie possible, donc pas de futur bébé possible. Il faut qu'il y ait ces deux ADN. Après, à partir de cet ADN, cet embryon va se développer.

[00:12:54.730] - Véronique Bellec

Pour ce qui est de la part de l'épigénétique, l'ovocyte de la donneuse va avoir ses propres marques épigénétiques venues de sa vie, de son environnement et de sa transmission transgénérationnelle. Puis, pareil, pour la part épigénétique liée aux spermatozoïdes et au futur papa. Là-dessus, il y a une grande discussion parmi les généticiens. Cette discussion existait déjà dans les années 2000, mais quand je vois les publications d'aujourd'hui, elle est toujours là. On a constaté, c'est confirmé qu'une part des phénomènes épigénétiques s'efface au moment de la formation des gamètes. Il y a deux moments, c'est à la formation des gamètes et au moment de la fécondation et du début de l'embryogenèse, mais on ne sait pas quelle part.

[00:13:57.120] - Véronique Bellec

On peut estimer qu'on va perdre des phénomènes épigénétiques venus de la donneuse et on va perdre des phénomènes épigénétiques venus du père, mais ça, c'est au cours de toutes les grossesses et c'est pareil si c'était un don de spermatozoïdes. Il y a une part des phénomènes transgénérationnels, des mémoires, des empreintes épigénétiques qui vont s'effacer, mais on ne sait pas laquelle et puis, ça dépend des mécanismes. Je vous ai parlé tout à l'heure des mécanismes qui sont : méthylation, histone, micro-ARN. Là, on constate que cette reprogrammation épigénétique, elle est fonction aussi du type de marque épigénétique qui porte l'empreinte ou la mémoire épigénétique. Ça va ?

[00:14:47.850] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, oui, oui. Je suis.

[00:14:51.330] - Véronique Bellec

Ce qui est quand même très important, c'est que dès l'implantation, même déjà quand l'embryon se trouve dans l'utérus de la mère, de la future maman, soit c'est une grossesse naturelle, soit c'est une grossesse où on a transplanté un embryon issu d'un don de gamètes ou pas, cet embryon, au stade blastocyste qui est celui où il va commencer à s'implanter, il va déjà recevoir des empreintes épigénétiques de la future maman, parce qu'on a constaté la présence de micro-ARN dans la cavité utérine de la future maman. Ces micro-ARN vont interagir au niveau de l'endomètre, au niveau de l'implantation et au niveau des premières phases de développement de l'embryon.

[00:15:44.040] - Véronique Bellec

Déjà, il y a ce lien entre la future mère et son futur bébé qui va commencer à impacter le développement de ses gènes, les gènes du futur bébé. Comme je le rappelle, ça veut dire certains gènes vont être plus ou moins exprimés, plus ou moins réprimés, à partir des gènes initiaux de l'ADN initial. Ça va moduler l'expression des gènes du futur bébé et ça, tout au long de la grossesse. Là, je vous ai parlé des micro-ARN dans la cavité utérine, mais après, il va y avoir les flux sanguins placentaires, donc l'échange de sang entre la mère et son bébé qui va faire qu'il y a énormément de facteurs épigénétiques qui vont être apportés au futur bébé et vont moduler ses gènes. Ces facteurs vont être apportés par l'alimentation de la maman, les émotions qu'elle va vivre, ses prises de médicaments, potentiellement de toxiques. Ça, ce n'est pas conseillé, mais tout ça, ça peut impacter le bébé.

[00:16:51.470] - Véronique Bellec

Ce que je rappelle aussi parce que ça, on ne le dit jamais, c'est que l'ADN est vibratoire, c'est-à-dire que l'expression des gènes est soumise à des impulsions électriques, électromagnétiques, mais aussi à la vibration due aux émotions. Par exemple, l'amour est un phénomène vibratoire, donc tout l'amour dont sera entouré ce bébé, aussi bien de la part de la mère que de la part du futur papa ou de l'environnement familial qui va transiter autour de la grossesse, tout ça, ça va aussi moduler, apporter des modifications épigénétiques au futur bébé.

[00:17:34.080] - Lisa (Barcelona IVF)

Finalement, si on transfère — pour parler un peu technique — un embryon dans la cavité utérine d'une femme et/ou le même embryon dans la cavité utérine d'une autre femme, finalement, le bébé à naître ne sera pas le même selon s'il s'est développé chez une femme ou chez une autre.

[00:18:01.280] - Véronique Bellec

Complètement, vous avez raison. C'est un petit peu comme quand on a étudié des vrais jumeaux nés d'une femme. Des vrais jumeaux, s'ils évoluent dans des environnements différents tous les deux, plus ou moins tôt, ils peuvent avoir pas le même type de santé, pas le même type de maladie et même leur physionomie peut être différente au fur et à mesure des années. Si on projette ça sur l'idée de deux embryons identiques dans deux utérus différents, effectivement, il n'y aura pas tout à fait le même développement.

[00:18:44.310] - Lisa (Barcelona IVF)

Quand vous accompagnent des femmes, des couples qui vont avoir recours au don d'ovocytes ou qui s'interrogent sur le don d'ovocytes, quels sont les questionnements qui sont les plus courants ou les réflexions aussi à avoir par rapport à cette démarche ?

[00:19:01.880] - Véronique Bellec

Il y a deux types de réflexions qui reviennent constamment. C'est, d'une part, l'inquiétude sur la ressemblance de l'enfant avec la mère, la future maman et sur le fait que... Les femmes, très souvent, disent : « Est-ce que mon enfant ne risque pas de me renier plus tard ? Me dire : Tu n'es pas ma mère. » ? Ça répond par une boutade souvent parce que je crois que de toute façon, quelles que soient les origines des parents ou des ADN des parents, nos enfants, à un moment, tentent de nous renier. Lors des crises de l'adolescence, par exemple : « Non, tu n'es même pas ma mère. » J'ai ma fille qui m'a dit : « De toute façon, je suis sûre qu'on m'a échangé à la maternité. »

[00:19:49.890] - Véronique Bellec

Plus sérieusement, oui, c'est une question quand même qui tanne beaucoup de mamans. Je dis qu'il y a aussi, quelquefois, sur la ressemblance des choses vraiment très étonnantes qui se passent. C'est-à-dire que c'est comme si cet enfant n'allait pas arriver par hasard dans ce couple et dans cette famille-là et que finalement, cet enfant, il aura peut-être les mêmes oreilles que cette maman ou le sourire du père de cette maman. J'ai pu accompagner des femmes qui ont déjà eu un enfant d'ovocytes et qui me font cette remarque. « C'est étonnant, mon enfant, il fronce le sourcil comme mon grand-père. » C'est la femme qui dit ça. Je pense, c'est comme des personnes âgées qui ont vécu très longtemps ensemble aussi au fil de la vie et après, il y a les expressions des visages qui envisageaient ce module. Ça, ça compte beaucoup.

[00:20:57.340] - Véronique Bellec

Je vais revenir après encore sur cette question-là, mais la deuxième question, c'est : est-ce que la femme se demande si elle va être capable d'aimer cet enfant ? Quelquefois.

[00:21:09.160] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui.

[00:21:09.340] - Véronique Bellec

Ça, je crois que déjà, il y a toute cette confiance en elle. C'est très important qu'elle se sente confiante de devenir la meilleure maman pour cet enfant et qu'ils seront tous les deux, elle et avec son compagnon, les meilleurs parents pour cet enfant et même la conviction qu'ils seront les meilleurs parents pour cet enfant, parce que s'ils n'avaient pas été là, cet enfant n'aurait jamais existé. S'il n'y avait pas eu ce désir initial très, très important, cette projection d'amour pour cet enfant, il ne serait pas là.

[00:21:49.630] - Véronique Bellec

J'ai juste posé des étapes, mais antérieurement, d'abord, la première chose, c'est que cette femme accepte qu'effectivement, elle ne va pas pouvoir donner vie à un enfant par son propre ADN. Ça, c'est vraiment l'étape initiale et ça demande d'être accompagnée dans cette réflexion. Je conseille vivement à ces parents en question du don d'ovocytes de prendre le temps de réfléchir à l'avance, parce qu'ils se précipitent en se disant : « Je suis incapable d'avoir des enfants, donc je vais utiliser l'ADN d'un ovocyte d'une femme donneuse par dépit un peu. » Ça, ce n'est pas forcément déjà favorable à l'implantation de cet enfant, don cette préparation initiale qui peut nécessiter d'en parler à un psychologue, un psychothérapeute, c'est vraiment important de prendre le temps.

[00:22:57.830] - Véronique Bellec

Même si le médecin, le gynécologue a dit : « Ne tardez pas, vous avez 43 ans. Chaque mois que vous attendrez, c'est un risque de vous faire perdre des chances. », non. Je dis que le temps qu'on prendra pour réfléchir à l'arrivée de cet enfant, pour se projeter, accepter en pleine conscience, avec confiance qu'on sera vraiment de bons parents pour cet enfant, ce temps-là n'est pas perdu. Si on prend six mois pour ce temps-là, c'est vraiment super et ça favorisera au contraire le succès de l'implantation du futur bébé.

[00:23:39.270] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, c'est vrai qu'on sous-estime un peu cet impact émotionnel et de réflexion autour du désir d'enfant et c'est vrai que c'est important de se sentir préparé. Il y a le parcours des personnes qui sont en parcours de FIV ou de PMA avec leurs propres gamètes, mais effectivement, aussi lorsqu'on passe au don d'ovocytes, c'est vrai que je crois qu'on est plutôt d'accord avec cette approche que c'est bien d'avoir réfléchi avant, de s'être posé les bonnes questions pour, finalement, accueillir cet embryon et accueillir le futur bébé et l'aider à l'accueil de l'enfant. C'est très important. C'est vrai qu'en plus, il faut penser. Dans le cadre du don d'ovocytes, c'est qu'on a un peu moins la pression de l'horloge biologique qu'on peut avoir lorsqu'on conçoit avec ses propres ovocytes et ça nous laisse un petit peu de temps quand même pour avoir cette réflexion.

[00:24:43.100] - Véronique Bellec

Ça laisse du temps. J'ai accompagné une femme qui a mis cinq ans. C'est-à-dire qu'à partir de l'âge de 42 ans, elle a voulu un deuxième enfant et le temps que son compagnon accepte cette idée et le temps qu'elle se fasse à l'idée aussi, parce que finalement, à 45 ans, ses ovocytes étaient assez vieux et il y avait peu de chances que ça fonctionne pour elle avec ses propres ovocytes. Il avait encore fallu deux ans pour qu'elle accepte l'idée d'un don d'ovocytes, mais finalement, à 47 ans, dès la première implantation, ça a fonctionné et là, ils sont les heureux parents d'une deuxième petite fille.

[00:25:28.520] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est une belle histoire.

[00:25:30.020] - Véronique Bellec

C'est une belle histoire. Donc oui, comme vous dites, là, l'horloge biologique a moins d'impact. Ce que je voulais dire aussi, c'est cette acceptation initiale de qu'il y aura un ADN qui sera étranger et qui va permettre l'arrivée de la vie de cet enfant. Cette acceptation est vraiment très importante aussi pour favoriser les processus de l'implantation, parce qu'il y a des phénomènes immunitaires lors de toute implantation d'embryon, d'ailleurs, même quand les deux parents ont transmis leurs propres gamètes. L'embryon est au départ comme un étranger dans l'utérus de la mère. Il y a déjà l'ADN du père qui n'est pas celui de la mère, donc il y a comme une sorte de cape de protection immunitaire qui va permettre aux cellules embryonnaires d'être acceptées par les cellules de l'endomètre pour une bonne implantation de l'embryon.

[00:26:50.160] - Véronique Bellec

Là aussi, il y a des processus épigénétiques d'ordre vibratoire, émotionnel qui vont faire que si cette femme accepte et dit : « OK, j'accepte en pleine conscience de recevoir cet ADN qui n'est pas de moi. », ça va vaporiser aussi les phénomènes d'implantation. C'est difficile à confirmer vraiment sur le plan biologique, mais j'en suis persuadée. L'amour est un phénomène vibratoire et l'impact, je crois qu'on commence à le mesurer, mais je pense que dans quelques années, on aura vraiment des moyens biologiques quasiment de le confirmer.

[00:27:37.740] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est vrai qu'on sait que de toute façon, avec les émotions, il y a un phénomène aussi d'agissement auprès de la physiologie, donc finalement, tout ça, même si c'est difficile de le prouver pour l'instant, en tout cas au jour aujourd'hui, de manière biologique, comme vous l'avez dit, c'est vrai qu'on se rend bien compte qu'il y a un lien entre toutes ces choses-là et effectivement, c'est important de ne pas les mettre de côté.

[00:28:05.360] - Véronique Bellec

Complètement.

[00:28:09.980] - Lisa (Barcelona IVF)

Vous avez parlé de l'ADN et c'est vrai que par rapport à ce que vous avez expliqué tout à l'heure, c'était la question de dire : « Finalement, quelle partie génétique je vais transmettre ? » Il n'y a pas vraiment de partie génétique.

[00:28:27.370] - Véronique Bellec

La partie génétique à proprement parler, effectivement, elle n'est pas transmise, mais l'expression de l'ADN de la donneuse va être modulée par tous les apports qui sont multiples, les apports épigénétiques multiples dès l'implantation et tout au long de la grossesse. Après, le lien va se créer aussi. Il va y avoir l'allaitement aussi qui va apporter d'autres [inaudible 00:28:55], si c'est possible, mais même s'il n'y a pas d'allaitement, comment la mère va tenir son enfant, elle peut aussi par le portage favoriser le lien qui va se créer avec cet enfant et tous les phénomènes épigénétiques qui vont apporter des modulations de l'expression de l'ADN initial.

[00:29:16.080] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est vrai que c'est vraiment des informations qui sont importantes, je pense, pour une femme, même pour le couple lorsqu'on se lance dans ce parcours parce que finalement, tout ce que vous avez expliqué, ça montre bien l'importance de cette grossesse, de la femme qui a porté l'enfant et qui ne serait pas le même s'il avait été porté par une autre femme. Je pense que ce bébé, il est là par la suite grâce à cette femme et c'est quand même extrêmement important, finalement. On parle beaucoup de génétique, mais cette partie-là, c'est quand même une partie extrêmement importante.

[00:29:59.970] - Véronique Bellec

Ça sera un enfant unique, mais comme tout enfant est unique, de toute façon, même dans une grossesse spontanée, on a la surprise de voir arriver un enfant, on ne sait pas quelle sera sa physionomie. Il ne va peut-être pas ressembler forcément à ses frères et sœurs quand il y a déjà des enfants dans la famille, même quand on a transmis son propre ADN. C'est toujours une surprise.

[00:30:27.720] - Lisa (Barcelona IVF)

Tout à fait, mais c'est vrai que ce qui est important ici, finalement, c'est qu'il y a de la transmission parce que souvent, c'est une des inquiétudes quand même, je crois. J'imagine que vous le voyez au niveau des femmes, des couples que vous accompagnez, c'est ce phénomène de transmission. Il y en a de la transmission dans tout cela et je pense que c'est vraiment important de le souligner aussi parce qu'on n'y pense pas forcément de prime abord, mais de la transmission, il y en a et il ne faut pas l'oublier.

[00:31:00.870] - Véronique Bellec

Il y en a et elle se passe tout le temps. Elle est déjà là dans le rêve qu'on a de ce futur enfant. Elle se fait déjà à ce moment-là.

[00:31:16.030] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est vraiment, en tout cas, un sujet qui est passionnant. Pour terminer, quels conseils vous aimeriez donner à ces femmes et à ces couples à qui on propose le don d'ovocytes ?

[00:31:33.620] - Véronique Bellec

Je vais revenir un peu sur ce que j'ai déjà dit par rapport à ces conseils. D'abord, il y a une première chose qui vient de mon constat, un premier concept qui vient de mon constat que malheureusement, je trouve que le don d'ovocytes est proposé de plus en plus rapidement aux femmes. Je pense que c'est quand même important de le dire. Je suis un peu étonnée, quelquefois, que le don d'ovocytes soit proposé à des femmes jeunes.

[00:32:15.710] - Véronique Bellec

Même si leur réserve ovarienne n'est pas excellente, même si elles sont déjà passées par des processus de PMA avec des échecs, je pense qu'il y a besoin d'abord de se poser la question et éventuellement, de demander un deuxième avis, est-ce que c'est vraiment indispensable ? Parce que j'ai vu aussi des femmes qui allaient à l'étranger pour un don d'ovocytes et qui, finalement, pour la grossesse suivante, avaient un enfant spontanément. Tout arrive, donc ne pas hésiter à demander plusieurs avis avant de se dire qu'effectivement, ça ne marchera jamais ou alors, effectivement, plus l'âge avance, plus ça sera difficilement. En plus, à 43 ans, en France, la PMA n'est plus prise en charge, mais-

[00:33:14.190] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, mais c'est intéressant que vous dites parce qu'effectivement, nous, de notre côté, en tout cas, parfois, on reçoit des patientes à qui on a refusé une prise en charge en France et qui ont moins de 43 ans et parfois qui sont prises en charge chez nous, que nous, on accepte.

[00:33:35.840] - Véronique Bellec

En PMA traditionnelle.

[00:33:37.780] - Lisa (Barcelona IVF)

En PMA traditionnelle, sans forcément passer au don d'ovocytes. Effectivement, si c'est compliqué, ça ne fonctionne pas, on a cette option du don d'ovocytes, mais c'est vrai que dans certains cas, c'est des solutions qui peuvent être envisagées et c'est vrai que c'est toujours bien aussi de demander un autre avis.

[00:33:59.000] - Véronique Bellec

Oui, je pense. Par exemple, récemment, j'ai entendu une jeune femme de 32 ans qui a fait plusieurs fausses couches et à qui on a dit : « Allez demander un don d'ovocytes. » Là, je ne suis pas d'accord. La fausse couche, ce n'est pas une raison de faire de la PMA, déjà, et encore moins, ce n'est pas une indication à un don d'ovocytes.

[00:34:20.300] - Lisa (Barcelona IVF)

Surtout avec les outils. Je pense que vous allez être d'accord avec moi, mais c'est vrai que malheureusement, en France, au jour d'aujourd'hui, il n'y a pas de possibilité de faire de diagnostic préimplantatoire sur les embryons, mais c'est vrai que typiquement, cette jeune femme, j'imagine que vous avez peut-être pensé à ça, c'est déjà une première option avant de se lancer dans le don d'ovocytes.

[00:34:41.730] - Véronique Bellec

Effectivement, je suis généticienne et j'ai bien conscience que... Je regrette en tant que généticienne qu'en France, il n'y ait pas de diagnostic préimplantatoire parce qu'on implante des embryons qui sont anormaux. Même si l'aspect au microscope est beau, ils peuvent être anormaux sur le plan chromosomique et du coup, il y aura échec malheureusement.

[00:35:03.220] - Lisa (Barcelona IVF)

Pardon, je rebondis parce que je pensais à un couple de patients. Après, c'est vrai qu'on a parfois des patients à qui on propose trop rapidement. Par expérience, parfois, on a eu des patients qui passaient à un don d'ovocytes parce qu'ils voulaient avoir leur bébé dans les bras et qu'ils étaient très fatigués, alors qu'ils auraient pu refaire une FIV classique en France avec leurs propres gamètes. C'est vrai que ça peut arriver aussi, mais je suis d'accord avec vous que parfois... Typiquement, cette patiente de 32 ans qui fait des fausses couches à répétition, peut-être qu'on va aller chercher, en tout cas, faire du diagnostic, essayer de comprendre pourquoi.

[00:35:43.760] - Véronique Bellec

Oui, complètement. Les fausses couches, ce n'est pas le thème d'aujourd'hui, mais c'est vrai qu'il peut y avoir une phase de vie où on va faire des fausses couches et deux ans plus tard, un enfant va arriver normalement et la vie reprend son cours.

[00:36:01.850] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, c'est ça. Après, c'est vrai que c'est un thème qui est très compliqué, les fausses couches, mais peut-être qu'on aura l'occasion d'en parler à un autre moment. En tout cas, c'est vrai qu'au niveau de la prise en charge, je suis assez d'accord avec vous.

[00:36:19.780] - Véronique Bellec

Sinon, le conseil principal, comme j'ai dit tout à l'heure déjà, c'est de prendre le temps de se préparer, revenir sur le désir profond de donner la vie à un enfant, à son enfant. Ce ne sera pas l'enfant de quelqu'un d'autre. Prendre le temps de trouver la confiance en soi, éventuellement en se faisant aider et que la femme puisse se dire : « Je serai la meilleure un moment pour cet enfant, j'ai en ai la conviction et il n'y aura pas d'autre maman pour cet enfant. Il sera mon enfant et je vais lui transmettre tout ce que je peux lui transmettre. » Voilà, dès ce moment de désir. Qu'est-ce que je pourrais ajouter ? Je pense que j'ai dit-

[00:37:13.530] - Lisa (Barcelona IVF)

C'est quand même des conseils vraiment importants. Je crois que c'est à avoir en tête quand on veut passer au don d'ovocytes, qu'on a une réflexion et puis, pour être prêt à accueillir cet enfant qui est tant désiré. Vraiment, je pense que vous nous avez donné beaucoup d'informations d'un point de vue génétique, épigénétique, sur le côté aussi émotionnel et tout ce qui se passe et vraiment, je vous dis un grand merci parce que ça va probablement aider beaucoup de personnes aussi qui nous écoutent, qui s'interrogent et qui peut-être sont dans le parcours déjà.

[00:38:07.750] - Lisa (Barcelona IVF)

Je pense que comme l'a dit le docteur Bellec, c'est bien de se faire accompagner et d'avoir ces réflexions.

[00:38:17.680] - Véronique Bellec

De prendre le temps de faire la réflexion.

[00:38:19.120] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, de prendre le temps de cette réflexion. Aussi, je voulais vous préciser parce que c'est vrai qu'on n'en a pas parlé au départ, mais si vous voulez plus d'informations sur l'épigénétique, l'impact sur la fertilité, le côté transgénérationnel, le docteur Véronique Bellec a écrit un ouvrage qui est vraiment très intéressant, que j'ai lu moi-même, qui s'appelle Donner la vie, science ou magie ?, publié aux éditions Josette Lyon, que vous pouvez trouver facilement si vous avez envie de creuser un petit peu plus sur ces sujets après avoir écouté ce podcast. Enfin, je voulais vous remercier à vous tous de nous avoir écoutés et puis, merci encore docteur Bellec et on vous dit à très bientôt.

[00:39:03.880] - Véronique Bellec

Merci Lisa et merci à tous et toutes et que la vie arrive.

[00:39:09.890] - Lisa (Barcelona IVF)

Oui, ça, c'est une très belle conclusion. Au revoir.

[00:39:12.720] - Véronique Bellec

Au revoir.

Barcelona IVF

On-Fertile Minds, The Barcelona IVF Podcast.